Concept de droit et globalisation.

L’objet de ces Rencontres n’est pas de décrire ce que l’on appelle la mondialisation ou la globalisation ni même la globalisation du droit. L’objet est de réfléchir sur la science du droit elle-même. Le point de départ reste donc la théorie du droit ou ce que Jean-Guy Belley appelle la «doctrine de la science du droit» dans un contexte de globalisation de la société et des normes. Nous partons de l’hypothèse qu’avec la globalisation en général et la globalisation dans le domaine du droit en particulier nous rencontrons des problèmes en ce qui concerne l’adéquation de notre vocabulaire et de nos concepts pour décrire, analyser et comparer les idées et les phénomènes qui se rapportent au droit et à la science du droit.
Le concept de droit peut être naturellement un bon candidat pour commencer l’analyse et la mise en questions de la science du droit dans la mondialisation. Le caractère «stato-centré» de notre concept de droit, qui plus est son caractère centré sur les États occidentaux libéraux, est, a priori, un des enjeux d’une discussion sur la théorie du droit dans la globalisation.
On peut se demander s’il ne convient pas de réfléchir à ce que pourrait être un affinement, par allègement et par simplification, du contenu de notre concept de droit permettant de le rendre plus ouvert à la diversité des systèmes juridiques ou encore à l’émergence d’un droit transnational globalisé. Mais on montrera que cette voie n’est pas la plus indiquée si l’on prend en considération ce qui est essentiel de la signification du concept de droit : il ne renvoie pas, pour reprendre les termes de Dworkin, à «la question sociologique», c’est-à-dire à la question du critère de reconnaissance, parmi les diverses structures de gouvernance, d’un système juridique. Il permet dans la philosophie du droit d’approfondir des questions doctrinales relatives à notre compréhension et à notre pratique du droit. Aussi c’est en approfondissant ces questions doctrinales que l’on a les meilleures chances de mieux aborder la globalisation du point de vue de la science du droit.
Cela mérite bien sûr quelques mots d’explications préliminaires sur la relecture du concept de droit dans la tradition analytique (I), avant que ne soient précisées les questions vers lesquelles se tourner pour espérer avancer dans la science du droit à l’heure de la mondialisation (II).

Jean-Yves Chérot

Professeur émérite en Droit public à la Faculté de droit et de science politique à la Faculté de Droit de l’Université d’Aix Marseille

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